Le dernier voyage de Momoko Hidaka : quand le silence devient mémoire
De Chisako Wakatake
Résumé
Momoko Hidaka, 74 ans, vit seule depuis la mort de son mari. Les jours s’étirent dans une lenteur feutrée : le thé du matin, les pas mesurés sur les tatamis, la rumeur des saisons qui passent. Dans ce quotidien silencieux, les voix du passé se font entendre, celles des ancêtres, des proches disparus, des promesses oubliées.
Entre souvenirs et regrets, Momoko revisite une existence faite de renoncements et de doux rêves inachevés. C’est l’histoire d’une femme qui, au soir de sa vie, entreprend son dernier voyage intérieur : celui de la réconciliation avec elle-même.
Les personnages
Momoko, héroïne crépusculaire, incarne la fragilité de l’âge et la beauté du dépouillement. Sa voix, parfois confuse, se mêle à celle de ses souvenirs et crée une poésie à la fois éthérée et profondément humaine.
Autour d’elle gravitent les ombres aimées, son mari disparu trop tôt, ses enfants éloignés, et les femmes de sa lignée, empreintes de traditions et de silences. Chaque figure, même absente, compose une pièce de ce puzzle intime où la mémoire devient matière vivante.
Mon avis
Ce roman est un murmure. Une lente respiration qui épouse le rythme d’un cœur vieillissant mais encore vibrant. À travers l’écriture de Chisako Wakatake, la vieillesse n’est pas une fin : elle est la continuité d’un monde intérieur qui s’éveille à mesure que le corps s’éteint.
Rien, le vide : mon homme mort prématurément, séparée de mes enfants, je n’aurais jamais pensé vivre une journée d’automne si solitaire.
Cette phrase, simple et déchirante, résume l’âme du récit. On y perçoit la résignation, la pudeur, et cette délicatesse japonaise qui nomme la douleur sans la crier. La plume de l’autrice oscille entre prose poétique et fragments introspectifs, parfois déroutants, mais d’une justesse bouleversante.
Le temps devient élastique : passé et présent se superposent, les souvenirs s’effilochent, les regrets se muent en tendresse. Momoko porte en elle la mélancolie du renoncement, mais aussi une lumière fragile, celle d’un dernier espoir, d’une paix qui s’esquisse à travers les fissures du souvenir.
La lenteur du récit est volontaire, presque méditative : elle invite à écouter le silence, à sentir la beauté d’un geste, le poids d’un regard. Si ce style peut dérouter, il offre en contrepartie une intimité rare et une profondeur émotionnelle qui imprègnent longtemps le lecteur.
Conclusion personnelle
Le dernier voyage de Momoko Hidaka est une ode au temps qui passe, à la douceur du souvenir et à la dignité du vieillissement. Ce livre se lit comme on contemple une estampe japonaise : lentement, avec respect, en laissant chaque détail imprégner l’âme.
Wakatake nous rappelle que vieillir, c’est aussi apprendre à aimer autrement, à travers la mémoire, les absences et cette lumière discrète qui persiste malgré tout. Une lecture rare, vibrante, où chaque mot semble suspendu entre ciel et terre.

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