Jean-Claude Greuzard - "Délire de Mai" (*) : Un thriller palpitant
Mon Avis
Cécile, Gabriel, Josette, Françoise et Samuel ont vécu les événements de Mai 68 avec l'engouement et les rêves de leur jeunesse. Plus de quarante ans plus tard, qu'est-il resté de leur lutte pour leurs idéaux ? Le groupe, dispersé par la vie et par ces années passées, va être amené à se remettre en question lors d'un rendez-vous où chacun devra rendre des comptes. Aux bancs des accusés, ils devront répondre de leurs actes devant un homme qu'ils avaient tous pourtant à tort occulté...
J'ai été littéralement happée par cette histoire et ces personnages qui font référence à une époque charnière et mouvementée. L'auteur nous précipite dans un engrenage où les confrontations réveillent les fêlures intimes, dans un huis clos catastrophique et oppressant.
"Oui, une sorte d'insouciance nous habitait. En quelques jours, tous les tabous sautaient les uns après les autres, un véritable jeu de dominos. Nous nous imaginions dominer le monde, changer la société de fond en comble. La réalité nous a vite rattrapés."
L'écriture est fluide et persuasive, alliant suspense, sens du rythme dans une synergie active et documentée. Le climat est électrique pour cette réunion orchestrée, où les invités sont pris en otage. On observe rapidement les tensions, les clivages, mais aussi les portraits écornés.
Qui est ce mystérieux Francis aussi redouté que fantasmé ?
Qu'est-ce qui l'anime et que cherche-t-il à démontrer ?
Le scénario met mal à l'aise, avec des attaques cinglantes, un piège sournois qui vire au cauchemar. Tandis que les destins se recoupent, les profils s'affinent. On parle ici, entre autres, d'éducation, de féminisme ou d'écologie avec des invectives qui n'ont parfois pas lieu d'être. On impute au sens commun une forme de responsabilité pour mieux piéger les culpabilités individuelles. On a le sentiment que Francis a été floué, absorbé par une effervescence dont il n'avait sans doute pas la clé. On ne peut que déplorer les dommages collatéraux, s'affoler devant le sentiment d'urgence aussi incontrôlable qu'irrévocable. La condamnation est sévère et sans appel, quand les dés sont déjà jetés. Jusqu'au bout, l'angoisse enfle, ça crépite, dans un flou furieux et apocalyptique.
Un roman captivant et ultralucide sur les paradoxes et les hypocrisies que nos sociétés nous font vivre. Un page-turner édifiant !
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